Intrerview avec Pilar Queralt et Gemma Mitjanas: "Nous devons unir nos forces pour la croissance de l'énergie géothermique"

Dans l'interview, Pilar Queralt et Gemma Mitjanas, scientifiques de l'Université de Barcelone qui développent des projets sur l'exploitation de l'énergie géothermique, parlent de leur parcours professionnel, du défi de concilier travail et vie de famille et de leur rôle dans le projet PIXIL.

 

  • Quelle est votre profession et depuis combien d'années êtes-vous impliquées dans le monde de la recherche ? 

Pilar Queralt:  J'ai obtenu mon doctorat en sciences physiques en décembre 1989. Je suis donc impliquée dans le monde de la recherche universitaire depuis de nombreuses années, en particulier dans le domaine de la géophysique. Je suis actuellement professeur de physique de la Terre à l’université.

Gemma Mitjanas: Je suis géologue à l'université de Barcelone, où j'ai également fait un master en géologie et géophysique des réservoirs. Je travaille actuellement sur ma thèse de doctorat. Mes recherches sont principalement axées sur l'application des méthodes géophysiques à l'étude des systèmes géothermiques. Je viens juste d'entamer la troisième année de ma thèse et par conséquent ma vision est celle d'un chercheur ayant peu d'expérience dans le domaine.

 

  • Qu'est-ce qui vous a motivé à suivre la voie de la recherche ?

Pilar Queralt: Dès mon plus jeune âge, j'ai aimé l'étude de la nature et des mathématiques, son langage. J'ai trouvé la recherche passionnante, car elle incite à se poser des questions et des problèmes, et à chercher des réponses ou des solutions.

Gemma Mitjanas: La vérité est que j'ai toujours su que je voulais me retrouver dans le monde de la recherche, me sentant facilement attirée par les projets de recherche, comme peuvent l’être les projets finaux de licence ou de master. Je suppose que cette affinité et cette détermination, ainsi que la chance d'avoir rencontré des chercheurs qui m'ont accompagnée dans les différents projets, m’ont encore plus motivée pour continuer sur cette voie.

 

  • Quels défis/obstacles avez-vous rencontrés pour poursuivre cette carrière ?

Pilar Queralt: Le monde de la recherche a aussi des composantes moins attrayantes mais nécessaires. Il y a des moments de traversée du désert, où l'on ne voit pas de résultats. Et cette carrière professionnelle est très stimulante, et le risque existe de déshumaniser la science : il faut être attentif et critique vis-à-vis de certaines dynamiques qui se créent. Heureusement, avec le temps, nous avons réussi à former une équipe de travail. Il est essentiel de créer des espaces où les gens peuvent collaborer et partager des connaissances et des ressources, qui servent également de soutien à tous les niveaux.

Gemma Mitjanas: Comme je l'ai dit plus tôt, je ne suis dans la recherche que depuis peu de temps, et par conséquent, pour l'instant, mon plus grand défi a été d'entrer dans ce “monde”. Contrairement à la génération de nos mères et de nos grands-mères, dans notre génération, il est parfois considéré comme allant de soi que, pour peu qu’on puisse le faire, il faut aller à l'université. À mon avis, ce "boom" d'étudiants universitaires et le peu d'offres d'emploi font que de nombreux jeunes choisissent de se consacrer à la recherche, ce qui rend difficile l'obtention de bourses en raison de la forte concurrence qui s'est créée.

 

  • Avez-vous vu une confrontation entre le choix d'une carrière de chercheur et votre vie personnelle ?

Pilar Queralt: Au début, oui, il y a un moment de "désenchantement". Vous ne voyez aucune opportunité, et quand vous êtes jeune, les conditions de travail sont parfois précaires. Aussi parce que vous ne savez pas comment canaliser votre passion pour la science avec d'autres intérêts personnels ou des préoccupations plus humanistes et sociales. Aujourd'hui, la recherche est plus proche des problèmes sociaux, mais il n'en a pas toujours été ainsi.

 

Gemma Mitjanas: En voyant des exemples de doctorants qui viennent de terminer leur thèse, je suis frappée par un aspect qui revient assez souvent et qui, je pense, pourrait finir par confronter ma carrière de recherche à ma vie personnelle. Je fais référence au peu de possibilités offertes aux chercheurs de poursuivre leurs recherches dans ce pays. Beaucoup, sinon tous mes collègues qui ont terminé leur thèse, ont dû partir pour poursuivre leur carrière de chercheur à l'étranger, et cela affecte clairement la vie personnelle. Devoir me séparer pour des raisons professionnelles de ma famille, de mon partenaire ou de mes amis me poserait un dilemme difficile et amer, principalement parce que je devrais changer ce qu'est aujourd’hui ma vie.

 

  • Qu'est-ce qui vous plaît dans le projet PIXIL ? Quelle est votre contribution ?

Pilar Queralt: J'aime la recherche de la synergie entre les sciences de la terre et les sciences informatiques, et que son application soit la géothermie. Une énergie propre que nous donne la Terre. Dans le projet PIXIL, notre groupe apporte son expérience en géophysique : tant des apports de données que des modèles réalistes qui permettent de valider les nouveaux algorithmes mathématiques développés par les autres partenaires du projet.

Gemma Mitjanas: En ce qui concerne le projet PIXIL, la partie qui m’attire le plus est le fait qu'il s'agisse d'un projet multidisciplinaire. Nous devons unir nos forces pour la croissance de l'énergie géothermique. Notre territoire a un grand avenir dans le secteur de la géothermie, et PIXIL est une puissante opportunité de collaborer avec des personnes expérimentées, tant de notre pays que d'autres pays, et qui appartiennent également à des secteurs variés: commercial, universitaire ou administratif. Pour l'instant, ma contribution à PIXIL a été de montrer comment nous avons utilisé la géophysique pour étudier un système géothermique dans la Conca del Vallès, à environ 40 km de Barcelone. Le tout dans l'intention de collaborer et de partager des idées et des visions pour améliorer l'exploration et l'application de cette ressource.

 

  • Quels messages donneriez-vous aux jeunes femmes qui veulent faire carrière dans la recherche ?

Pilar Queralt: Qu'elles cherchent à travailler dans ce qui les passionne, et que, s'il n'est pas facile de trouver par où avancer, elles doivent être patientes et persévérer. A la fin, elles trouveront leur place. Et qu'elles cherchent autant que possible à créer un groupe de travail où elles peuvent se développer professionnellement et humainement.  

Gemma Mitjanas: Aux futures chercheuses, je dirais : allez-y. Tôt ou tard, des opportunités se présentent si vous y mettez toute votre envie et vos efforts. Il faut aussi préciser qu'il faut être ouvert à différentes possibilités et être prêt à faire quelques sacrifices personnels.  Malgré cela, je ne doute pas que ce secteur ne déçoive pas. Avec le peu de temps que j'ai eu, j’ai pu apprécier comment cela permet d’apprendre constamment, de rencontrer une variété de personnes de disciplines différentes, et de voyager à travers le monde.

 

 

En savoir plus du Pilar Queralt
https://webgrec.ub.edu/webpages/000009/cat/pilar.queralt.ub.edu.html
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En savoir plus du Gemma Mitjanas
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